Faut-il adopter le langage inclusif au quotidien ?

En octobre, le premier dictionnaire « inclusif » de la langue italienne sera publié par Treccani en Italie.

Ce dictionnaire comprendra, parmi les entrées, le genre féminin pour chaque profession (par exemple : « avvocata », « medica »…) et des adjectifs.

En plus, Treccani a décidé de respecter l’ordre alphabétique même pour énumérer les mots au masculin et au féminin : le feminin, qui en italien se termine par « a », est positionné avant le masculin, qui se termine par « o ».  L'égalité des genres est également assurée par les exemples donnés, avec l’élimination des stéréotypes de genre : il n’y aura pas que les femmes qui repassent, pas seulement les hommes qui dirigent les entreprises.

Mais qu’est-ce que le langage inclusif ?

Le langage inclusif est un ensemble de pratiques linguistiques qui ont comme objectif de bannir l’emploi d’un langage qui reproduit les rapports de genre, en« démasculinisant » la langue et en évitant les expressions renforçant les stéréotypes de genre.

Des débats sur la nécessité d’introduire un langage inclusif ont émergé dans les années 70 et continuent encore aujourd’hui. Pourtant, son intégration est variable dans la francophonie.

Et dans la langue française ?

Alpheratz, linguiste et spécialiste du français inclusif et du genre neutre, définit le langage inclusif comme « l’ensemble de variations du français standard fondées sur le genre et comme variété en usage dans plusieurs groupes sociaux ayant pour point commun une conscience et/ou une politique de genre ». (Alpheratz, Grammaire du français inclusif : littérature, philologie, linguistique, 2018).

Alpheratz le considère aussi une variation « diaéthique » du français, car il relève « la conscience de genre, d’identité, d’égalité et de la performativité de la langue », la « conscience d’effectuer un acte politique motivé par une conscience de genre et par le souci du respect des représentations symboliques et des catégories sociales minorisées » (Alpheratz 2018). Alpheratz propose ainsi la création d’un genre neutre en français.

Des exemples dans la langue française :

En général, pour s’exprimer de manière « non sexiste » il y a de différentes techniques, graphiques et syntaxiques, visant à assurer une égalité des représentations entre les femmes et les hommes. Il s’agit également de rendre visible dans la langue les personnes non binaires aussi, qui en sont toujours exclues.

Les pratiques possibles sont :

·      La feminilisation de certains noms de métiers qui seraient uniquement déclinés au masculin (« professeure »ou « professeuse ») ;

·      le doublet : « Français et Françaises» ;

·      les formes contractées, à travers l’emploi de parenthèses ou d’un « / » (« musicien(ne) », « musicien/ne»), du e majuscule (« douéEs »), du trait d’union (« un-e français-e »), du point (« français.e.s »), du point médian (« français·e·s ») ;

·      la double flexion : « agriculteur/trices »;

·      aussià travers de néologismes qui mélangent les deux flexions : « agriculteurices ».

Ces formes, bien qu’elles incluent les deux genres, masculin et féminin, ne tiennent pas compte des personnes non binaires, qui ne sentent représentés par aucun genre. Pour répondre à ce besoin, il existe d’autres alternatives :

·      l’emploi de formules qui soient englobantes :« la population française » au lieu de « les Français » ;

·      l’emploi de mots qui ont la même forme aux deux genres : « personnalité politique »plutôt que « homme politique » ;

·      les flexions neutres en æ (« douæ »au lieu de « doué.e »)

·      l’utilisation de « al, als, auz, çauz » qui remplacent « il, ils, eux, ceux » en emploi impersonnel ou générique (Alpheratz) :

Exemples :

Al pleut.

On attend Léa et Yoann. Als sont en retard.

Pourquoi le langage inclusif est l’objet de polémiques ?

Certains amoureux de la langue, ou bien des conservateurs sans exceptions, considèrent l’utilisation du langage inclusif comme une« atteinte » à la langue française.

« Je me considère comme un homme féministe », soutient l’ex ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, mais « je suis très réservé » car « cette écriture inclusive, elle morcelle les mots ».

Le philosophe Raphaël Enthoven définit le langage inclusif comme une « agression de la syntaxe par l’égalitarisme » qui donne« des mots illisibles », et « une réécriture qui appauvrit le langage ».

En revanche, Maria Candea, sociolinguiste à l’université Sorbonne-Nouvelle, considère le langage inclusif comme une« consécration » des luttes féministes au fil des années. Elle avance que le langage doit nécessairement s’adapter à la réalité : « Peu importe la forme qu’on lui donne, l’essentiel est que ce langage permette de rendre tout le monde visible », explique-t-elle à l’AFP. « Si une langue n’évolue pas, elle meurt ».

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